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Meurtre d’un rochelais à Cognac : Assises de la Charente « vues du public »

Agnès Moreau, psychopraticienne, assistait pour la première fois à un procès d’assises, parmi le public. Voici son compte rendu teinté d’un regard professionnel.


Depuis le lundi 10 octobre 2022, la cour d’assise de Charente est réunie pour juger trois accusés principaux d’un crime particulièrement ignoble, dont la victime est un rochelais d’origine, vivant dans les Deux Sévres (Cerizay) : Gérald Matifas 41 ans.

NDLR : L’avocate générale a requis perpétuité pour les 3 accusés principaux ce lundi matin 17 octobre.

J’avais entendu parler de l’affaire, car une des accusées principale est originaire de Thouars. Cela faisait longtemps que j’avais envie d’assister à un procès d’assises.

Agnès M.
Agnès Moreau

Agnès Moreau, psychopraticienne et thérapeute de couple.
 » Du plus longtemps que je m’en souvienne, j’ai toujours été fascinée par les relations interpersonnelles, en particulier dans le couple et dans la famille, et très jeune j’ai cherché à en comprendre les mécanismes et les rouages…C’est maintenant mon quotidien. »

Gérald Matifas a trouvé la mort en avril 2019 à Cognac, après avoir croisé la route d’un trio infernal. Les trois accusés doivent répondre devant la cour d’assise d’Angoulême d’un meurtre précédé d’extorsion de fonds et d’actes de violence et de barbarie. La malheureuse victime avait rencontré Cathy Bichon sur les réseaux sociaux et après une correspondance de plusieurs semaines, cette dernière l’avait invité chez elle à Cognac. Sur fond d’alcool et de stupéfiants, plusieurs soirées se sont déroulées chez Madame Bichon, en compagnie de la victime, et d’amis et de connaissances de celle-ci, jusqu’à la soirée des premières violences…
Ce soir-là, Madame Bichon est passablement énervée contre Monsieur Matifas, en effet la nuit précédente, il a tenté de se rapprocher d’elle, elle l’a éconduit, il n’a pas insisté, mais elle lui aurait demandé de partir, ce qu’il n’a pas fait…

David Klein et Philippe Laroche arrivent en début de soirée chez Madame Bichon, ils la trouvent en train d’insulter Monsieur Matifas, pour changer d’environnement et d’ambiance, Monsieur Laroche propose de se rendre à la base « plein air » ; sur le chemin, ils achètent une bouteille de whisky, et Madame Bichon qui connaît bien les rouages de la personnalité de Monsieur Klein et de Monsieur Laroche, leur dit exactement ce qu’il faut pour les faire vriller… Le psychologue et le psychiatre l’estiment beaucoup plus intelligente que ses co-auteurs et capable de manipulation.

Elle sait exactement sur quel ressort appuyer afin de déclencher la violence de David Klein et de Philippe Laroche, ceux-ci ont pour point commun d’avoir eu une enfance particulièrement miséreuse et surtout d’avoir reçu des violences extrêmes, par leur gravité et leur fréquence de la part de leurs parents, ils sont tous les deux les aînés de leur fratrie et semble-t-il les souffre-douleurs préférés de leurs bourreaux.

Au moment des faits, David Klein qui avait eu une brève relation, un an auparavant, souhaitait reconquérir Cathy Bichon, quand à Philippe Laroche, il la connaissait depuis peu, elle lui avait d’abord fait des avances…
Qu’il avait repoussées, parce qu’il se considérait le cousin de Monsieur Klein, (même s’ils n’ont pas de lien de parenté), il aurait répondu à Madame Bichon, qu’il ne pouvait pas, car c’était la femme de son cousin en quête d’un autre lien : d’un commun accord, ils avaient décidé qu’il l’appellerait Maman et qu’elle l’appellerait Fils.
Ces trois personnes ont grandit avec de fortes carences affectives et un faible étayage, Madame Bichon aussi a eu une enfance qui ne lui a pas permis de se construire, elle a grandi sans père, comme quatre de ses frères et sœurs sur cinq et sans même savoir qui est son père, avec une mère démissionnaire…

Comme l’a dit l’expert psychiatre : « le ciment c’est l’amour », je préciserai même la quête d’amour, en effet ces trois individus, capables du pire, sont en recherche d’amour et d’appartenance, ils cherchent à remplacer leur famille défaillante ou démembrée. Madame Bichon avait perdu la garde de ses quatre enfants (trois étaient placés par l’ASE et un chez son père), suite à de graves violences conjugales de la part du père de son dernier enfant.

Monsieur Klein cherche à refaire couple avec Madame Bichon et c’est entre deux nuits de tortures, qu’ils renoueront, il parait sous emprise de Madame Bichon, et prêt à faire n’importe quoi pour elle… Monsieur Laroche est en quête de famille, il est plus jeune (27 ans), il a choisi comme cousin Monsieur Klein et comme « Maman » Cathy Bichon, seulement de 11 ans son aînée…
Ce souhait d’appartenance à la famille et aux valeurs qu’il y rattache pourra expliquer la montée de violence en lui.

Madame Bichon, seule avec trois hommes, va ressentir un énorme sentiment de puissance et va vriller au point de réaliser dans sa vie quelque chose d’EXTRA ordinaire… A tel point qu’elle se dit en train d’écrire un livre sur sa vie…

Le soir des premiers coups, le 8 avril 2019 : Madame Bichon dit à David Klein que Gerald Matifas a essayé de la violer, elle dit à Philippe Laroche « qu’il a violé l’intimité de Maman » et que c’est un pédophile, car il n’a plus le droit de voir sa fille Tessa…

Elle manipule deux esprits influençables sans capacité d’analyse de la situation, elle se met en scène avec ces deux hommes à ses pieds, prêts à faire n’importe quoi pour lui prouver leur loyauté. Et je pense qu’à un moment elle va vriller elle aussi, ce sentiment de puissance lui donne des ailes et la rendra plus active dans les actes de torture.

Revenons à la soirée du 8 avril 2019, à la base plein air, Philippe est remonté à bloc par les déclarations de Cathy, il commence à donner des coups de poings à Gérald, il se pense légitime pour le faire, car « il aurait violé l’intimité de Maman » et ce serait un « pédophile » …
A ce moment de la soirée, on aurait demandé à Gérald de partir et il ne se serait pas saisi de cette opportunité…

Après les coups reçus : David et Philippe soutiennent Gérald pour le ramener chez Cathy.
Le calvaire de ce pauvre homme a commencé depuis quelques heures et ne se terminera que le surlendemain !

Arrivé chez Cathy, on s’occupe de s’approprier la carte bancaire de Gérald et de lui soutirer son code, un retrait est effectué par Cathy et Philippe, David reste seul avec Gérald, il se ventera de l’avoir frappé à leur retour…

Vrai ou juste volonté de se montrer courageux, alors qu’il ressort des enquêtes que c’est un grand peureux…

Au retour de la banque : la carte SIM et la carte bancaire de la victime sont détruites, on a l’impression, qu’à ce moment le point de non-retour est atteint et que les acteurs sont pris dans un engrenage de violence qui ne pourra cesser qu’au décès de Gérald.

Il s’en suit une nuit de violences ordinaires, Gérard est jeté ou traîné dans la cave, les trois accusés s’installent dans la cave avec des verres d’alcool, ils vont continuer de le frapper et de l’aiguillonner avec des couteaux sans le blesser profondément.

Au bout de plusieurs heures, la fatigue et l’alcool saisissent les participants qui vont se coucher… laissant Gérald dans la cave !

Cathy et David refont couple à cette occasion…

Le matin Gérald serait remonté tout seul de la cave, le malheureux y aurait été renvoyé, après avoir bu un peu d’eau et fumé une cigarette… arrivé à la cave, Gerald est attaché et ensuite, chacun vaque à ses occupations, ensemble ou séparément et la recherche d’une solution pour évacuer le corps d’un homme qui n’est pas encore mort, semble occuper complètement les pensées des trois protagonistes !

Le soir venu, les trois bourreaux retournent dans la cave avec du whisky (une bouteille par personne), du cannabis et une cigarette de cocaïne en fin de soirée…

Là, Cathy Bichon semble être dans un état de surexcitation, elle est désignée par les deux autres, comme l’initiatrice de pires sévices sexuels : introduire des objets afin de réaliser des sodomies sur la victime (sextoy, puis bouteilles de plus en plus grosses, introduites avec beaucoup de violence notamment des coups de pieds). Chacun participera à ces viols.

Cathy aurait eu ensuite une idée pour se venger définitivement de cet homme (qui ne lui a rien fait) ou de tous les autres ?

Elle a l’idée de lui couper le sexe ! A tour de rôle, ils s’y essayeront, avec différents couteaux…

Le pauvre homme ne pouvait plus crier, car on lui avait enfoncé profondément une chaussette dans la bouche et lors de la dernière torture, il semblerait que le malheureux aurait perdu connaissance.

Le corps de Gérald recevra en tout 57 coups de couteaux, dont trois mortels, Cathy essayera d’en finir en donnant des coups de couteau à la gorge, mais ils resteront en surface, un des trois achèvera le calvaire de la victime en donnant trois coups de couteau dans le péricarde et le cœur, j’ai une intime conviction par rapport à la personne qui a donné ces trois coups, mais rien n’a été établi et je ne pense pas que la clé du procès soit là, car vu l’état de la victime, ces coups de couteau ont plutôt servi à la délivrer de son calvaire.

En écrivant, je me rends compte qu’il y a trois coups mortels, comme il y a trois coups au théâtre, cette histoire est tellement surréaliste, que l’on a l’impression de sortir d’un cauchemar, d’un film d’horreur…

Cette histoire est terrible, mais j’ai la conviction qu’il ne faut juste un concours de circonstances pour démarrer ce terrible engrenage…

Agnès M.

Ces trois individus ont mis leur vie en scène pour avoir l’illusion d’exister, d’appartenir… Mais ce fut un marché de dupe, car les interrogatoires, les confrontations ont brisé ces unions de chair et de sang, maintenant c’est chacun pour soi, David a pris soin de préciser aux experts qu’il n’était plus en couple avec Cathy, et Philippe ne l’appelle plus Maman, seul le lien entre ces deux écorchés vifs semble encore possible, même s’il n’y a plus qu’un fil…

La personnalité de ces trois individus et leur manque d’étayage dans l’enfance, permettent de comprendre la mise en place du piège, qui s’est refermé sur la malheureuse victime, mais aussi sur les trois accusés… Crime de la misère matérielle, psychique, affective et sexuelle, il semble que ces conditions puissent se retrouver chez de nombreuses personnes et qu’il suffit d’une allumette pour commencer à actionner l’engrenage fatal.

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